Le rappeur Français Zalem sort son premier album intitulé « seul dans la foule ». Il a été enregistré en deux jours en juillet 2012 (à l’exception d’un titre réalisé en février) . Le produit est le fruit de collaborations, certaines inédites, d’autres s’inscrivant dans une plus longue tradition de travaux communs.
La pochette du CD a été réalisée pour l’occasion par le plasticien Bruce Clarke, qui avait déjà illustré le premier CD (« fruit de ma passion »/2008) de l’artiste. Entretien avec un rappeur qui porte l’Afrique dans son cœur.
>Par Mensan Videha (Fo-mê)
1. Vous êtes en pleine finalisation de votre premier album intitulé « Seul dans la foule », quelles sont les thématiques que vous abordez à travers vos morceaux ?
Contrairement à mes projets précédents, ce premier album sera plus introspectif, plus resserré. Ainsi il n’y aura que 9 titres dessus.
Au niveau des chansons à thèmes, il y en a une sur le racisme négrophobe en France et une sur le lynchage aux USA. Sinon il sera question de solitude, de connaissance, d’écriture, tout ça de manière assez transversale.
2. Vous semblez avoir une certaine attache pour l’Afrique, et vous semblez même être influencé par Le Président Burkinabé Thomas Sankara. Qu’est ce que cette personnalité vous inspire ?
Un profond respect. Je me souviens très bien d’où j’étais quand j’ai lu son nom pour la première fois et que j’ai commencé à découvrir son œuvre. Depuis j’essaie de lui rendre hommage dès que possible. On le retrouve sur toutes mes pochettes récentes. Sur la dernière figure également George Jackson, qui est devenu l’autre figure de proue de ma « mythologie militante ». Tout deux me fascinent. J’ai beaucoup d’autres sources d’inspirations, mais ces deux là sont vraiment en tête de liste. Après, je ne veux pas faire de grandes phrases donc je m’arrêterai là !
3. Quels sont les artistes qui sont invités sur cet album et quelle relation entretenez vous avec ces derniers ?
Il y a 3 rappeurs invités sur l’album : Elom 20ce, Sitou Koudadjé et Al Benz. Ce sont des gens que j’apprécie musicalement et humainement, c’est fondamental pour faire un featuring. Tous ces morceaux ont été faits dans le même studio au même moment, j’essaie d’éviter la collaboration à distance.
Elom 20ce fait partie du label Asrafo Records, au Togo. Je l’ai rencontré physiquement pour la première fois en janvier 2010 lors de l’enregistrement d’un morceau collectif en amont de l’élection présidentielle togolaise. Depuis on est resté en contact, et on a fait pas mal d’activités en commun (concerts, ateliers, morceaux, clips, etc), vu la distance qui nous sépare !
Sitou Koudadjé est membre du groupe Dangereux Dinosaures et du collectif RAO Staff. Je connaissais déjà son groupe, mais c’est via Elom qu’on s’est vu la première fois. Il prépare actuellement son premier album aussi, « 21 grammes », prévu dans les semaines à venir. Affaire à suivre également !
Al Benz est plus discret sur ses activités musicales, mais c’est un vrai tueur. C’est celui que je connais depuis le plus longtemps.
Il aurait dû y avoir Bud aussi, avec qui je travaille régulièrement depuis 2007, mais ça ne s’est pas fait pour diverses raisons. Ce n’est que partie remise. Et il signe trois des instrus de l’album. Il y en a cinq autres de Shaman et une de Nizi. Et on retrouve le saxophone de Nathalie Ahadji sur l’un des titres.
4. Pourquoi avoir décidé d’être rappeur militant?
Quand j’ai balbutié mes premiers textes, je ne savais pas trop pourquoi j’écrivais. C’est quand j’ai commencé à m’intéresser à la françafrique, et après des discussions avec un de mes cousins, que tout naturellement j’ai rangé l’ensemble de mes textes dans une pochette et que je suis reparti de zéro. Mes deux premiers projets « publiques » étaient remplis de morceaux « engagés » sur un ton très brut, surtout dans « fruit de ma passion ». J’ai enchaîné les morceaux sur la françafrique notamment, sans vraiment me répéter, puisque je changeais de point de vue ou d’exactions à décrire (j’avais le choix).
Mais aujourd’hui je ne me définirais plus de cette façon. Je ne veux plus d’étiquettes. Je suis rappeur, c’est tout. J’ai changé mon approche du rap. Cela ne m’intéresse plus de faire des morceaux en forme d’énumérations de données. Comme je dis dans l’intro de l’album :
Toujours pas de divertissement fadasse pour ados
Mais moins de dates et d’événements je fais pas classe d’histoire-géo
Je recherche plus de finesse, et j’ai aussi des textes plus introspectifs. Ce qui importe c’est que l’intensité reste.
5. Vous participez régulièrement aux festivals Arctivism qu’organise le label indépendant Togolais Asrafo Records. Quels sont les points communs entre vous et les acteurs de cet évènement ?
C’est vrai que j’ai eu la chance de croiser deux fois la route d’Arctivism, et bientôt une troisième à Paris (le 4 octobre).
En ce qui concerne nos points communs, c’est difficile de répondre sans se vautrer dans un torrent de banalités. Mais je dirai simplement que nous voulons un monde meilleur et que nous partageons des valeurs communes, comme l’intégrité par exemple. On ne se prend pas pour des saints mais on sait qui on est, ce qu’on fait et ce qu’on veut. Et on se donne les moyens de réaliser ce qu’on entreprend.
Je pense que l’on se retrouve derrière plusieurs bannières, et notamment celle-ci : « Libres et sauvages ».
6. Vous qui avez eu souvent l’opportunité de faire des scènes rap en Afrique, quel bilan faites vous en ce qui concerne l’évolution de cette musique sur le continent ?
J’ai effectivement eu l’opportunité (que j’ai parfois provoqué) de faire quelques concerts en Afrique. Pour être précis 6 au Togo, 4 au Burkina Faso et 2 au Maroc, plus quelques interventions à gauche à droite dans des soirées open mic et des émissions radios. Mais je suis mal placé pour juger de l’évolution. Je n’ai pas une culture rap très approfondie. Ce que je peux dire c’est que des gens comme Elom 20ce et le label Asrafo Records ne peuvent que tirer par le haut la discipline (dans tout les sens du terme d’ailleurs !).
Mais pour rester sur cet exemple, je me suis retrouvé récemment avec les Asrafos à Ouagadougou et les gens ne connaissaient pas Elom, alors qu’il est à quelques centaines de kilomètres de là. A côté de ça le showbiz du rap français fait un carton là-bas… Après je ne suis pas naïf, je sais bien comment ça marche, mais il n’est jamais mauvais de rappeler que ce n’est pas normal.
7. vous qui avez consacré plusieurs chansons aux relations contre les relations mafieuses entre la France et l’Afrique. Pensez-vous qu’avec l’élection de François Hollande comme Président en France, les choses ont évolué ?
Blaise Compaoré, après Ali Bongo notamment, sort tout juste de l’Elysée et Idriss Déby arrive dans quelques jours ! Je n’ai rien à ajouter.
8. Vous avez récemment lancé un appel à financement pour votre album via internet, pourquoi avoir choisit ce mode de financement ?
C’est un bon moyen pour les gens de soutenir un projet. L’argent va directement à l’artiste (moins une commission pour le site). Le but aussi est de faire participer des gens qui ne me connaisse pas et qui me découvrirait par ce biais. Bon, pour l’instant il n’y a pas de contributeurs inconnus ! Mais il y a encore quelques jours.
La suite c’est par ici : http://fr.ulule.com/zalem
9. Quels sont vos projets à court et à long terme ?
Le premier projet c’est de sortir cet album, parce que je ne l’ai pas encore entre les mains. Ensuite j’aimerais le défendre sur scène autant que possible.
A côté de ça je commence à préparer son petit frère. J’ai déjà quelques instrus, mais j’en cherche encore. Avis aux amateurs !
10. Qu’est ce que vous espérez pour cet album ?
J’espère que ce premier album qui est le fruit de beaucoup de travail et d’investissements plaira aux gens. Tant dans le fond que dans la forme il est assez différent de ce que j’ai fait jusqu’à présent.
11. Un mot de fin ?
Je remercie les gens qui me soutiennent, d’une manière ou d’une autre, depuis quelques semaines ou des années. Je n’ai pas la mémoire ingrate.
Merci pour ces questions.
L’album « Seul dans la foule » sort officiellement le 18 octobre , avec à la clé un concert avec Elom aka M’kpékpé makpézan , Sitou (RAO Staff) et Bud
stay in tuned / suivez Zalem sur sa page www.facebook.com/zalemrap
Tracklisting :
1. Seul dans la foule (prod Nizi)
2. Humeur noire (prod Shaman)
3. La géo de mon cerveau (prod Bud avec Nathalie Ahadji)
4. Si le coeur mendie (prod Bud)
5. Têtes lépreuses feat Elom20ce (prod Shaman)
6. Prométhée feat SitouKoudadjé (prod Shaman)
7. De l’esprit de l’oie (prod Bud)
8. Sans sanctuaire (prod Shaman)
9. De A à Z feat Al Benz (prod Shaman)
Force à mon tchalé !!!