Déjà classé second parmi les lauréats du concours RFI découvertes 2014 alors qu’il n’avait qu’un seul album (Ikirangamisi) à son actif, BOBONA nous revient avec un second opus de confirmation de son talent. S’il est vrai que depuis le premier album nous avions tellement apprivoisé sa douce voix qu’il semblait à chaque mélomane qu’ils soient devenus « abagenzi » justement « amis » en Kirundi, ce deuxième opus à une saveur particulière et très étrange. Les mélodies et textes de cet album sont si simples et harmonieux qu’ils restent encrés au cerveau tel l’encre indélébile à une vitesse supersonique. Ne soyez pas surpris de vous entendre répéter tout doucement à l’intérieur de vous-même des milliers des fois les refrains des morceaux tels que « Yambi nari ngukumbuye », ou « Lala Lilala ». Vous n’êtes pas fou. C’est l’effet BOBONA qui touche tous ceux qui écoutent son nouvel album. Tellement des bébés qui apprennent à peine à parler, j’ai surpris en train de chanter « Yambi nari ngukumbuye », au moment où leurs parents enchainent avec « au village natal…..imuhira ». A voir cet engouement pour ce nouvel opus je ne doute pas que durant ses concerts live il n’aura qu’à jouer les instruments. Le public fera le reste.
Afrique.fr : Pourquoi avez-vous intitulé votre album « abagenzi » ? Existe-t-il un même fil conducteur entre les différentes chansons de l’album ?
BOBONA : Parce que « Abagenzi » (amis) c’est tout dans la vie en général et encore plus dans la culture burundaise, car nous avons besoin de nous sentir amis avec notre société, notre entourage. D’après moi l’amitié c’est la base de tous les rapports sains et positifs, qui vont au-delà d’une bière partagée au cabaret. Raison pour laquelle j’ai dédié une chanson de mon album (c’est la chanson « Abagenzi », qui donne le titre à mon deuxième album) à ce thème tant fort pour moi.
Afrique.fr : Vu la qualité professionnelle de l’album, le doute plane. A-t-il été produit entièrement au Burundi ? Qui sont les producteurs, musiciens, et collaborateurs ?
BOBONA : Je vous confirme que cet album a été enregistré et produit entièrement au Burundi, au « Madiba Studio » de Bachir Dia. Je suis le compositeur de toutes les chansons de mon album (sauf deux chansons anciennes de deux grands artistes burundais), et les textes des chansons en français et italien qui ont été corrigées par Camilla et Johnny. Ça a été un grand projet, 16 chansons enregistrées avec les meilleurs musiciens professionnels de la scène burundaise, notamment le grand producteur arrangeur pianiste Marc Kibamba, le producteur Bachir Dia pour le mixage et le mastering, puis le grand guitariste Budy, Johnny, Yayo, Arsène et Jospin à la guitare, Yvan et Régis à la basse, Amadi et Christian à la batterie, Farley aux percussions et Imani au piano. Concernant les backings voices j’ai travaillé avec Chance, Suzan, Jojo, Liziki et Lissa. Sans oublier Linah Blanche et Juliette avec lesquelles j’ai fait deux featuring. Des amis aussi ont participé à une chanson,« Ikiremwamuntu », s’agit de Francis Muhire, Alex la journaliste et Willy. Le Burundi est un petit pays qui ne manque pas de talents.
Afrique.fr : Produire un album durant ces jours de crise au Burundi n’est-ce pas être trop optimiste ? A quand la sortie officielle de l’album ?
BOBONA : Je crois que continuer à rêver et à lutter pour nos rêves et nos projets c’est une façon d’essayer de survivre à la crise et de se donner du courage, et d’en donner aux autres. Plusieurs soirs je me suis retrouvé au studio avec les musiciens sans savoir comment rentrer car on tirait trop proche, mais ceci ne m’a pas découragé, au contraire, ça m’a donné la force d’arriver jusqu’au bout car personnellement j’ai vécu pire que ça dans mon passé. J’aurais aimé organiser le lancement officiel de mon album au Burundi mais à cause de la situation je n’ai pas pu. Le projet reste là, à voir où le réaliser.
Afrique.fr : Pour avoir eu l’occasion de l’écouter en premier, votre album aborde plusieurs thématiques, l’amour « impeta », l’amitié « abagenzi », les enfants non reconnus « ni uwande »?, la lutte contre le racisme « ikiremwamuntu » ,…. mais pas de thèmes spécifique sur le Burundi pourquoi ?
BOBONA : Concernant certains sujets spécifiques sur le Burundi, comme la politique par exemple, ou la crise, je préfère ne pas les aborder à travers mes chansons, ce n’est pas dans mes objectifs. En réalité mes chansons parlent de tous les aspects de la vie, et tous concernent aussi (mais pas seulement) le Burundi. Par exemple dans la chanson « Au village natal » je chante la nostalgie que tout le monde peut ressentir en étant loin de chez soi…. « NI UWANDE » ? Ahahah (rires)!!! Les enfants non reconnus ? ! Dans « Ni uwande » je ne parle pas des enfants non reconnus mais plutôt d’un garçon qui voit une belle fille, il tombe amoureux d’elle et il demande à son ami « elle est à qui ?!? ». Pourquoi j’ai utilisé le terme « umwana » (enfant en kirundi) ? Parce que c’est un terme très utilisé dans le kirundi parlé de la jeunesse burundaise, surtout à Bujumbura. Le texte de la chanson « Impeta » , en français « la bague », tourne clairement autour du thème des fiançailles qui naissent d’une amitié et qui amènent au mariage. Dans la chanson « Ikiremwamuntu » j’ai voulu toucher vraiment tous les pays du monde, car le racisme est un fléau de l’humanité qui se répand vite, aussi au Burundi.
Afrique.fr : Deux albums professionnels de haute qualité. Que comptez-vous en faire ? Songez-vous à l’exportation de votre art ? Quels sont vos projets ? Un tour –concert prévu dans les prochains jours ?
BOBONA : Oui, absolument, c’est ce que j’ai déjà commencé il y a 3 ans et je continue à me battre pour ça. Ça n’a pas été facile et il ne l’est toujours pas. J’ai aussi d’autres objectifs, je viens de terminer le tournage du clip de ma chanson «Au village natal » en Italie, où je vais participer aussi à « Tour Music Fest », un festival italien. Après ma participation au Prix Découvertes RFI 2014 où j’ai remporté la deuxième place, cela sera la première fois où je me retrouverai face à face avec des étiquettes et label comme Sony Music Italie, Universal Music Italie, MTV Italie et tant d’autres managers et agents tourneurs. De plus, j’aurai la chance de profiter de formations dans le cadre de la musique et du show business. Mon objectif c’est celui d’enrichir mes connaissances et d’élargir mon entourage musical professionnel.
Pour ce qui concerne un tour soliste professionnel, je crois que ça ne sera pas envisageable au court terme, car la vision que j’ai m’amène à devoir le projeter soigneusement. Impossible d’improviser! Le soutien d’une agence est impératif pour la bonne réussite d’une tournée. J’ai aussi un rêve de longue date, un featuring avec un grand musicien chanteur africain…on verra si ce rêve finira par se réaliser.
Afrique.fr : Merci pour l’entretien et bon courage.
BOBONA : Merci beaucoup pour l’entretien, j’espère fortement de te retrouver bientôt et échanger à propos de tous ces projets déjà réalisés.
Propos Recueillis par Adolphe BIREHANISENGE
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