Il fait partit d’une nouvelle génération d’artistes qui a décidée de prendre en main sa destiné, une génération qui a su tirer leçons des échecs de leurs aînés dans le game. Pour le Djanta (surnom qu’il porte avec fierté depuis sa première percée solo en 2014), la musique c’est un combat et il faut avoir tous les atouts de son côté pour s’en sortir. Artiste, animateur radio, activiste, promoteur culturel bourré d’imaginations, KanAa nous entraine sans embarras dans son univers musical, à travers cette interview sincère et ouverte…
1. Présentez-vous à nos lecteurs.
Bonjour les kamites, moi c’est KanAa, jeune africain d’origine togolaise âgé de 26 ans, féru de culture et de communication. Je suis sur la scène Hip Hop locale depuis 2006. D’abord avec mon groupe 585 BOIZ, avec lequel j’ai remporté deux awards, et sorti un album La force de nos rêves en 2009. J’ai débuté ma carrière solo en 2012 après le départ de quelques membres du crew pour l’occident. En 2014, je sors mon premier single solo DjAnta avec le fameux hashtag #Jattendsdjanta, disponible sur toutes les plateformes de téléchargement légal. La vidéo est sortie en fin d’année. Et là après Bless my soul avec Kezita, je viens offrir le DjAntaRemix de Et p8 koi ? du Camerounais Jovi. Voilà résumé vite fait le DjAnta que je suis.
2. Vous venez de sortir un tout dernier single intitulé « Et puis quoi », qui fait le buzz sur les réseaux sociaux. Parler nous un peu de ce projet musical.
Je tiens juste à préciser que ce single n’est en fait qu’un remix. Tout l’honneur de la version originale revient au rappeur Camerounais JOVI et son label New Bell. Pour ceux qui savent, ce morceau est actuellement « LE HIT » hip hop en Afrique francophone. JOVI a mis l’instrumental de son morceau en téléchargement libre et a invité toute l’Afrique à le reprendre. Mon manager et directeur artistique (ndlr : Dieudonné StraussTom aka Blvck Djvntv) m’a donc suggéré de le remixé. A la base, moi-même je suis un gros fan du son, donc ça n’a pas été difficile de kicker dessus. J’en ai profité pour faire un peu d’égo trip, d’exercice de style et pour répondre à certaines critiques que j’ai reçues avec la sortie de DjAnta, dans la pure tradition hip hop quoi…lol
3. Vous adopté un nouveau style de rap qui fait pensé un peu au gangster Rap Américain des années 90 et dans vos sorties l’expression « Rap Game » revient toujours. Comment expliquez-vous cette nouvelle attitude Hip Hop ?
Ewooooe, gangsta Rap moi ?non non, du tout ! Je fais du Hip Hop Africain, je rappe mes réalités. Même sur des prods US, je reste moi-même. Je vais être forcément influencé par ce que j’écoute, mais c’est toujours l’africain que je suis au moins à 65%. Quand je parle de « Rap Game », je parle de la scène locale. Pour moi, ça reste un game, un jeu. Et à l’image de la vie, « Only the strong will survive » (ndlr : seul le plus fort survivra, sélection naturelle). Et comme je dis, « le Rap game c’est une guerre, mais dis-moi comment puis-je perdre si tous les titulaires qui tuent sont dans ma team ? ». lol.
4. On vous connaît très actif dans le milieu culturel, vous êtes souvent au carrefour des projets de tous genres. Aujourd’hui être un simple artiste ne suffit plus pour percer dans le milieu de la musique ?
Rires. On va dire que je suis un artiste à part. C’est mon amour de la musique qui m’a amené au monde des médias, et ma musique s’est trouvée enrichie et nourrie à son tour de ce monde. J’ai eu la chance de développer des capacités qui servent la cause culturelle. Donc je m’en sers tout naturellement. Et je continuerais à le faire, chaque fois que besoin sera si j’en ai les moyens bien sûr. Pour revenir à ta question, pour réussir dans la musique aujourd’hui, le talent ne suffit plus. Il faut savoir s’entourer d’une équipe compétente. Le rôle de l’artiste c’est de produire de la bonne musique, le produit que sa team se chargera de vendre. Je vois beaucoup d’artistes doués mal finir, tout simplement parce que leur entourage n’a pas le niveau de leurs talents. Quant à moi jusque-là, je ne me plains pas. Mes gars me suivent, et je suis mes gars. Et si tout va bien, 2015 sera une belle année. Né va émé.
5. Ramener des petits kicks phonétiques dans le rap comme « Ma parole est tombée » (ègbé nyé dzé anyi en mina), vous remets toujours dans cette alchimie de mots que vous aviez précédemment initié avec votre ancienne formation Rap Rang des Gueules. Pour vous ces innovations sont-ils importantes dans votre musique ?
Petite correction Rang Des Gueules, c’est les grands frères, c’est l’école à laquelle j’ai grandi. Pour les kicks phonétiques, ce sont ces petites touches qui me permettent d’exister. Nous sommes sur un marché ou apporter sa différence est essentielle si on veut être visible. Je ne maitrise pas ma langue maternelle (ndlr : Ewé), mais je la comprends. Il me parait important de la transmettre au monde, c’est aussi ça rapper ses réalités. « Ma parole est tombée », c’est la traduction littérale d’une expression qu’on utilise chez moi pour signifier la fin d’une intervention, d’un discours ou d’une discussion. Autre exemple, j’ai remis au gout du jour le terme « DjAnta », qui veut dire « lion » dans ma langue. Et tous les jeunes l’utilisent fièrement maintenant. Je sais d’où je viens, et je n’en ai pas honte. Alors innovation je ne dirais pas, c’est plutôt une nécessité.
6. Lorsque vous dites à la fin du morceau « Et puis quoi » que c’est les rappeurs eux-mêmes qui tuent le Game au Togo à quoi vous faites allusion ?
Rires. Je m’attendais à cette question. C’est tout simple. Le hip hop, ça va bien au-delà d’une musique, c’est une culture à part entière. C’est un mode de vie. Beaucoup ne l’ont pas compris. Surtout ma génération, pour laquelle c’est juste une mode. C’est ce genre de pensée qui tue le hip hop. On n’est pas prêt à défendre ce qui nous définit. Oui je sais qu’il faut savoir suivre le marché, mais on peut s’adapter sans se travestir. Et peu font l’effort de rester eux-mêmes. Moi je les appelle les « artistes – girouettes », qui suivent la direction du vent. De position de leader en 2003-2005, le hip hop est un « outsider » aujourd’hui. Mais pourtant toujours aussi apprécié par les jeunes. N’est-ce pas paradoxal ?
7. Entant que jeune artiste rappeur, quel regard portez-vous sur l’Afrique de demain ?
Les indicateurs sont dans le rouge. Et pour le ramener dans le vert, il y a un gros travail à faire. On a un sérieux problème d’identité. Ma génération passe son temps à se calquer sur l’occident. En même temps, je ne leur en veux pas, vu que c’est les seuls modèles culturels qu’on nous propose. Au-delà de l’identité, il y a un problème d’environnement : politique, économique, technologique, juridique… l’Afrique de demain, c’est possible, seulement si on comprend que le développement ne veut pas forcément dire « ressembler à l’occident d’aujourd’hui ».
8. Le panafricanisme, vous y croyez ?
Ah oui, panafricaniste convaincu. Ce n’est même pas une question de croyance, c’est une nécessité. On ne pourra pas survivre sinon. La meilleure façon d’avilir l’Afrique, c’est de la diviser. Votre question me fait penser à cette citation qui me fait énormément réfléchir : «… ça marche mieux quand eux-mêmes ne savent pas qu’ils sont des esclaves.. ». Et c’est vrai, des esclaves, c’est ce que nous sommes. Bref un panafricanisme des peuples, oui ! Faire tomber les frontières, travailler ensemble, faire de l’argent ensemble, c’est possible si on finit par comprendre que les anciens colons – ni les nouveaux d’ailleurs – ne sont pas nos amis.
9. Des projets en vue ?
On n’est artiste que part la qualité de nos productions, alors oui j’ai plein de projets. Je ne peux pas tous les dévoiler, mais sachez que mon premier album solo Rythmes est prévu pour 2016, sinon d’ici là une mixtape gratuite, des remix, des collaborations, et le prochain single Kekeli. Il y a un plus grand projet à une échelle africaine, mais je garde le suspense pour le moment. Plus de détails au temps opportun.
10. Un mot de fin ?
Merci à votre site web et ses publications de qualité. Merci à tous ceux qui suivent le DjAnta et le soutiennent de quelque manière que ce soit. The best is yet to come. N’oubliez pas de checker ma page facebook « KanAa Miabé Djanta », mon twitter/instagram @kanaabizou, et joignez moi via whatsapp 00228 9885 2000. Merci pour l’amour et le partage. Akpé. Ma parole est tombée.
Telecharger le nouveau single « Et p8 quoi sur ce lien:
http://www.voluncorp.com/telechargement-946-kanaa–et-p-koi-djantaremix.aspx